La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 8 juin 2023, un arrêt assez iconoclaste et qui a probablement vocation à demeurer assez isolé.
En effet, un couple disposait d’un billet aller-retour Vienne-Île Maurice (7-20 mars 2020). Pendant le séjour de ces deux passagers, la pandémie de COVID-19 s’est accélérée et les confinements sont arrivés.
Si les deux passagers ont effectivement pu se rendre à l’Île Maurice, en revanche, le vol retour a été annulé mais les consommateurs ne l’ont appris que la veille de leur retour. Ils ont également été informés de l’existence d’un vol de rapatriement (payant) organisé par la société AUSTRIAN AIRLINES AG. Ils ont accepté de régler le supplément exigé par cette compagnie aérienne. Néanmoins, à leur retour, ils ont introduit une action devant le tribunal de district de Schwechat afin de solliciter une condamnation de la société AUSTRIAN AIRLINES AG à leur rembourser cette participation qu’ils jugent indue.
Cette juridiction a fait droit à la réclamation des passagers mais la société AUSTRIAN AIRLINES AG a exercé un recours devant le tribunal régional de Korneubourg qui a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice de l’Union européenne les deux questions préjudicielles suivantes :
Convient-il d’interpréter l’article 5, paragraphe 1, sous a), et l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (n° 261/2004), en ce sens qu’un vol de rapatriement effectué dans le cadre de l’activité de puissance publique d’un État doit également être considéré comme un « réacheminement vers la destination finale, dans des conditions de transport comparables » devant être offert par le transporteur aérien effectif en cas d’annulation, lorsque le transporteur aérien effectif ne peut certes pas justifier d’un droit
au transport du passager, mais avait la possibilité d’inscrire le passager pour ce vol et d’en assumer les frais et lorsque c’est en fin de compte avec le même avion et aux mêmes horaires, prévus pour le vol initial annulé, que le transporteur aérien effectif effectue le vol en vertu d’un accord contractuel
avec l’État ?
Convient-il d’interpréter l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 261/2004, en ce sens qu’un passager qui s’inscrit lui-même pour un vol de rapatriement visé dans la première question, et qui verse à ce titre à l’État une participation aux frais obligatoire, a contre le transporteur aérien (effectif) un droit au remboursement de ces frais qui
découle directement du règlement n° 261/2004, bien que ces frais ne constituent pas exclusivement le coût net du vol ?
Cette question n’est pas dépourvue d’intérêt.
La Cour rappelle d’abord le contenu de plusieurs articles et notamment le fait que le droit européen des passagers aériens doit offrir à ces derniers un niveau de protection très élevé.
Ensuite, il convenait donc de savoir si le vol de rapatriement organisé par un État constitue un réacheminement.
La Cour remarque que la notion de « réacheminement » n’a jamais été définie. Toutefois, elle conclut sa démonstration en jugeant que « seuls des vols commerciaux sont susceptibles d’intervenir dans la mise en œuvre d’un tel réacheminement. ». Or, un vol de rapatriement ne revêt pas une nature commerciale et ne saurait donc être associé à un quelconque réacheminement.
Concernant la seconde question, la Cour y répond également positivement. Elle rappelle, au passage, que la pandémie de COVID-19 ne saurait exonérer le transporteur aérien effectif de l’ensemble de ses obligations. Ainsi, l’obligation d’assistance dudit transporteur ne disparaît pas.