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Nécessité de la preuve des passagers à l’enregistrement : fin de partie !

8 novembre 2020

La Cour de cassation vient de rendre deux arrêts en date du 21 octobre 2020 qui closent le débat qu’elle avait contribué à créer en 2018 : dans le cas d’un retard substantiel de vol (supérieur à trois heures), est-il utile que les passagers prouvent leur présence à l’embarquement par le biais de la production de leurs « boarding pass » ? La Cour de cassation estimait que oui, avec une rigidité souvent critiquée[1]. Mais ce positionnement avait été clairement désavoué par la Cour de justice de l’Union européenne :

 

« dès lors qu’ils atteignent leur destination avec un retard égal ou supérieur à trois heures, lesdits passagers bénéficient du droit à indemnisation au titre de ce retard en vertu du règlement (CE) n° 261/2004, sans devoir fournir, à cette fin, la carte d’embarquement ou un autre document attestant leur présence, dans les délais prescrits, à l’enregistrement du vol retardé ».

 

Cela revient à laisser à la compagnie aérienne la charge de la preuve de l’absence de présence du passager au sein de l’aéronef.

 

Deux cas revenaient devant la Cour de cassation en 2019 : deux passagers avaient réservé des vols auprès de la société EASYJET AIRLINE COMPANY LIMITED, l’un pour vol Lille-Bordeaux et l’autre pour un trajet Lisbonne-Bordeaux. Dans les deux cas, on a pu constater des retards significatifs ouvrant droit à indemnisation. Les deux passagers ont saisi le tribunal d’instance d’Aulnay-sous-Bois qui, sur le fondement de la jurisprudence de la Cour de cassation précédemment décrite, a rejeté leurs demandes, estimant qu’ils n’apportaient pas la preuve de leur présence à l’embarquement.

 

La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi, a, du fait de l’ordonnance de la Cour de justice de l’Union européenne, été obligée de battre en retraite et de prendre le parti des passagers, renvoyant ainsi les parties devant une autre juridiction.

 

Cette « capitulation » est logique au regard de la supériorité du droit de l’Union européenne sur le droit national.

 

[1] Laurent BLOCH, Précisions récentes sur le règlement (CE) 261/2004 du 11 février 2004 relatif à la responsabilité des transporteurs aériens, Responsabilité civile et assurances n° 1, janvier 2020, étude 1 ; Benjamin CHEYNEL, Droits des passagers du transport aérien - . – Tendances récentes et perspectives, Contrats Concurrence Consommation n° 5, mai 2019, étude 7